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laissaient en lui un mélange de douceur et d’effroi. Son esprit ébauchait parfois une explication du phénomène moral qu’il ressentait. Des affinités, dont les circonstances avaient respecté le sommeil, s’éveillaient-elles pour lui révéler combien l’âme des aïeux se prolonge en celle de leurs fils ? Oui, la sève du passé coulait dans ses veines intense…Ou bien, il devait se condamner, jeune homme, de ne pas avoir déjà cultivé les germes de pur enthousiasme que renfermait son être et qui subitement palpitaient au meilleur de sa vie ! Il s’accusa de nonchalance à l’égard de sa race, de ne pas avoir eu la curiosité de son héroïsme, la passion d’en connaître l’histoire, un véritable orgueil de ses traditions. Au collège, il n’avait, qu’effleuré de son cœur les triomphes et les souffrances de la race française au Canada, il n’y avait pas applaudi ou compati de tout son amour. L’inconstance de son esprit, qu’attiraient alors les études les plus diverses et les examens sans cesse à l’horizon, le rendait si peu attentif à l’épopée canadienne, qu’il ne vibrait que superficiellement aux souvenirs. Les grands jours de la Nouvelle-France ne l’avaient guère plus ému qu’Austerlitz ou l’holocauste des Thermopyles. Et depuis le collège, les vagues de patriotisme déchaînées au loin ne lui apportaient qu’une rumeur assourdie. La science l’ac-