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encore. Mais les profils sont le plus souvent incompris : les sourires, voilà, ils sont plus accessibles, palpables, tout le monde leur rend hommage. Aussi, a-t-il un faible pour ceux-ci, a-t-il plus confiance en eux pour entraîner l’admiration hésitante. Au miroir donc, il essaye la portée de ses sourires. Gradués avec un art très fin, depuis le sourire humide et voilé jusqu’au sourire large et gazouillant, ils enveloppent, ils enlacent, ils étreignent, ils font défaillir.

Ainsi, rien de plus mystérieusement charmeur que le sourire félin dont il caresse Yvonne, en ce moment. Il lui tend son profil de gauche à la contemplation. Une fossette ombrée serpente quelque part dans la joue. Les lèvres remuent de frémissements. Quelle scintillante cravate ! Elle est irréprochable, moulée comme un rêve de souplesse et de légèreté : les couleurs ne s’harmonisent pas tout-à-fait bien, mais l’éclat en est si foudroyant ! Moins toutefois que les feux de ce diamant beaucoup moins riche qu’il n’en a l’air ! Qui jamais saura combien il a fallu de remaniements pour donner au mouchoir, voltigeant près du cœur, cette allure de grâce ailée ? On dirait qu’il s’envole. Plus que cela, le beau Lucien tout entier plane, vaporeux, nimbé d’aisance lumineuse. Les pantalons, dont les plis sont rigides, bouffent et le soulèvent, les chaus-