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est heureuse de vivre ! Elle crépite d’allégresse et d’exubérance, elle module un air de triomphe.

Au dehors, l’ouragan traverse les plaines d’Abraham d’une énorme clameur. Yvonne et Gaspard se sentent l’âme plus glacée, plus lugubre, quand des gémissements plus aigus les ébranlent d’un frisson. Ils s’empressent alors, d’un élan instinctif, de revenir à la flamme douce et gaie. Le père, à la voir aussi bienfaisante, aussi généreuse, éprouve une sensation inconnue d’apaisement et de bonté.. C’est comme si la douleur au plus intime d’elle-même s’en allait très loin, calme, bénigne, lorsqu’Yvonne entend la flamme vivre et lui murmurer de l’espérance…

Gaspard, hélas ! avec une maladresse cruelle, suggère de la consolation :

— Ça ne durera peut-être pas, l’indépendance de ton mari ?

Farouche, elle réplique :

— Il ne m’aimera jamais !…

— Tu le vois bien que je ne peux rien faire !

— Mais oui, puisque nous sommes tristes ensemble…

De la cheminée vient une chanson grave et tendre qui berce, endort peu à peu leur tristesse…

— Il est si facile de te guérir, mon père ! dit Yvonne, timide.