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CE QUE DISAIT LA FLAMME…

Elle sentait grossir en elle de l’opposition contre la promesse d’amour prochaine…

— J’allais vous dire ce que je pense depuis que je vous ai connue ! s’écria-t-il, railleur à son tour. Cela ne vous intéresse pas, je le garderai pour moi.

— Toujours ?

— Jusqu’à ce que vous désiriez m’entendre !

— Suis-je distraite ? dit-elle, haletante.

— Vous me fuyez, Lucile, vous ne voulez pas me croire ! Il y a si longtemps que j’étouffe, il me semble, de garder le silence. Je ne suis pas venu, je dois avoir couru ce soir. Des paroles douces, oh ! si douces, m’obsédaient, me parurent dignes de vous. Dès que je vous ai revue, je les ai perdues… Il ne m’arrive que des morceaux de phrases insignifiants, qui ne contiennent rien de ce que je sens pour vous… Ah ! que c’est profond, Lucile, que c’est bienfaisant, que cela rend noble et joyeux de vivre ! Dites, vous ne refusez pas ? J’ai besoin de vous, de votre sourire, de votre âme si haute, si brave !…

Lucile immobilise sur Jean des yeux éperdus, navrés d’extase. Tressaillante jusqu’aux profondeurs les plus vives de l’être, elle écoute l’harmonie d’amour. Elle est impuissante contre l’émoi, contre la défaillance… Elle a le vertige de vouloir en mourir…