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CE QUE DISAIT LA FLAMME…

dès lors, il faudra qu’un superbe dévouement l’agite, le rehausse, le transforme ! Il s’agit bien d’une évolution qu’elle suscitera, qu’elle soutiendra, qu’elle vivifiera. Leur affection n’en sera-t-elle pas ennoblie et inébranlable ?…

Il y a peu de jours, comme s’il se fût ingénié à s’étaler, Lucien lui parut si infatué de lui-même et volage que l’épouvante la reprit. Elle fut, pour ainsi dire, écrasée par la masse d’une vanité solide, incorrigible. Puisqu’elle savait, pourquoi ne se lassait-elle pas d’un tel amour, pourquoi le besoin de s’en affranchir ne lui venait-il pas ? Elle eut beau s’aigrir contre elle-même, elle affermit son amour…

Une bonté âpre la gonflait d’en être malgré tout orgueilleuse…

Aujourd’hui, l’impertinence des œillades à l’Américaine a fait renaître les doutes, puis l’angoisse… Yvonne a derechef, maladroite, recouru à l’agression, rallumé les susceptibilités du jeune homme. Il attend les explications, il presse, il la fascine des yeux impatients. D’abord, elle a vacillé, un recul d’âme l’a interdite. Il n’est qu’une excuse à tant d’acrimonie, de violente malice : dévoiler la crise morale à travers laquelle tout elle-même a passé, qui l’a torturée pour mieux l’assouplir à un idéal clair, vrai et magnanime. Bien que celui-ci l’ait conquise, la