frère à la sœur. Elle chérissait encore l’ami de son enfance lumineuse, le confident toujours sympathique de ses premiers rêves de jeune fille, mais plus distraitement, avec moins d’impétueuse tendresse. Seul à voir naître la séparation morale entre eux, Jean fut le seul à en souffrir. Il ne s’en plaignit pas auprès d’elle, assuré qu’elle ne serait pas conquise par la frivolité. Elle avait un cœur trop affamé de jouissances élevées pour que cette effervescence de plaisir demeurât longtemps sa raison de vivre. Le tourbillon de la vogue s’apaiserait, et elle reviendrait à elle-même, au besoin des épanchements fraternels, au souci d’un avenir qui ne fût pas uniquement oisif et superficiel. Ainsi tranquillisé par le ferme caractère de sa sœur, harcelé d’ailleurs par les craintes de l’examen, Jean ne fit pas à Yvonne le reproche de le délaisser, de presque l’oublier. Inconsciente de la chose, elle avait perdu la coutume d’aller, aux heures où le désenchantement fait descendre le vide au fond de l’être, quérir auprès du frère le mot qui relève et le sourire qui pacifie.
La séduction aguerrie de Lucien Desloges avait agi sur elle, dès le premier jour où, présentés l’un à l’autre, ils s’étaient donnés à une longue causerie entraînante. Ce jeune homme avait un passé bien garni d’amour. Yvonne en fut aver-