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CE QUE DISAIT LA FLAMME…

cisive. La grande affection du père et de la mère l’un pour l’autre l’avait depuis longtemps émerveillée, et à les voir si heureux, si touchants, elle habitua son cœur à leur union mystérieuse… Sans la comprendre, elle en devinait le charme, la noblesse, la solidité. Leur joie perpétuelle avait animé d’indéfinissables rêves en elle, les avait développés, affinés. Certains de leurs sourires ardents l’attendrissaient elle-même, longuement pensive après eux. Quelques paroles chaudes en informèrent Jean : « C’est bien simple, dit-elle, ils ont tant de bonheur, papa et maman, que cela me rend heureuse, moi aussi !… heureuse !… tellement !… »

Tout son visage avait fulguré de souvenirs. N’était-ce pas de leur affection splendide que découlait l’admiration de la jeune fille pour ses parents ? Elle était fière d’eux, les chérissait outre mesure, ne les distinguant qu’à travers une auréole de beauté morale…

Jean ne put douter qu’elle n’était glacée d’aucune naïveté, d’aucune ignorance, d’aucune vulgarité chez eux. Au contact des personnes élégantes foisonnant à la maison Seifert, elle eût pu être gâtée par l’envie, écouter le regret d’appartenir à une classe méconnue d’elles. Bien loin de regagner le logis de son père avec des rancœurs et d’y rentrer, le dépit noir au fond de l’âme, elle s’y précipitait radieuse de plaisir et de sincérité.