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CE QUE DISAIT LA FLAMME…

amour tenace et merveilleux. Si puissante en fut l’ivresse qu’il ne devait plus en contester la profondeur, la nécessité, le lien durable avec sa vie même… Il n’est pas étonnant que, le lendemain, sous l’empire d’une clairvoyance réagissante, il ait ramassé toute sa raison contre cette passion pour l’analyser et la juger. Jusqu’ici, entraîné par un penchant auquel il se donnait avec bonheur, il n’a pas étudié le caractère, la pensée, l’énigme supérieure de l’humble amie. Il ne méprisa pas, il fut aveugle. N’ignorait-il pas le plus intime, le plus touchant, le plus sacré d’elle-même ? Ceci l’attira, le retint comme le réel devoir montant de la conscience : aller vers Lucile, afin de lui être juste, de l’approfondir et d’illuminer son amour aux rayons d’une expérience vigilante. De cette décision, il ressentit un apaisement indicible…

C’est aujourd’hui la troisième entrevue depuis le jour où, faible contre l’impulsion vers elle, il rejoignit la jeune fille auprès de la Basilique et ne s’en éloigna qu’au seuil de l’obscure maison paternelle. À la même heure, à ce même endroit, à la rue Buade vibrante, il l’attendit, il la chercha, il la revit, il la pria de ne pas le refuser. Troublé, conquis, timide, ce lui fut une chose peu facile de procéder à l’examen calme dont il avait réglé l’objectif et les détails