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CE QUE DISAIT LA FLAMME…

— Oubliez que je vous ai demandé cela !

— C’est comme… des nuages en moi… c’est impossible d’avoir les mots. Tenez, j’aurais besoin de vous pour me deviner, pour m’exprimer.

— Vous êtes heureuse et vous ne l’êtes pas ?

— Non, ce n’est pas cela, il me semble que rien ne manque, que je suis vraiment heureuse… et pourtant, c’est un peu cela…

— Il manque quelque chose ? ajoute Jean, avec un sourire.

— C’est presque rien…

— Et c’est, beaucoup !

— Je l’ignore…

— Ne le devinez-vous pas ?

— Je me laisse faire par l’impression… je n’essaye pas de la comprendre… je sens que je ne suis pas capable… c’est comme si j’attendais et si j’avais déjà ce que j’attends, de la tristesse et de la joie… N’est-ce pas ridicule, tout cela ?

— Mais non ! protesta son ami.

— Il me semble que ce n’est pas ridicule, mais… nécessaire. Tenez, cela me rappelle ce qu’on nous enseigne à l’église : le bonheur entier n’est pas de ce côté de la vie… À force d’en parler, cela devient plus clair… Ce doit être le besoin du grand bonheur complet… Ici-bas, nos joies ne sont que… le début du ciel. Et notre être