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CE QUE DISAIT LA FLAMME…

quelques trivialités, quelques sentiments désagréables devraient échapper à Lucile au fil de la causerie familière. L’énigme de cette retenue, de cette finesse morale attire Jean qui veut la saisir. Il résout de la faire causer d’elle-même, de son existence, de ses rêves, de son âme profonde…

Après la minute de silence où leurs âmes essayèrent tant de s’expliquer l’une l’autre, il reprit avec une humilité qui rassura Lucile davantage :

— Votre surprise… je crois plutôt… que c’était de la peine… oh ! légère… un désappointement qui brise un peu… Ne dites rien, nous nous sommes compris ! C’est ma faute : je fus superficiel après avoir déclaré ma vraie pensée !

— Mais non, c’est ma faute, parce que j’ai douté.

— Nous ne recommencerons pas à nous quereller, dit-il. Nous sommes très loin de ce que je désirais savoir tout à l’heure. Quand vous avez dit : « C’est beau, c’est bon d’être si jeune », n’avez-vous pas laissé paraître un regret quelconque ? Votre père est guéri : vous êtes adorée par toute votre famille… J’ai cru voir dans vos paroles une ombre de tristesse… Je ne veux pas être indiscret : ne me répondez que si vous le jugez bon vous-même.

— Cela m’embarrasse beaucoup…