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CE QUE DISAIT LA FLAMME…

— Voici un joli compliment, tu peux t’en vanter !

— Il n’a pas celle de l’amour, parce que c’est toujours lui seul qu’il aime…

— Puisqu’il s’aime autant lui-même, il a du moins cette fierté !

— Ce n’est pas la pure et vraie fierté, celle que rassasient les instincts moindres !…

— Parle donc franchement, tu veux dire les instincts vils ?

— Non, Yvonne, je dis que sa fierté s’arrête là où le grand amour commence…

— Ah ! ah ! le grand amour, la fumisterie des poètes ! Charlatanisme des romans pour ingénues ! À d’autres, s’il vous plaît !

— Eh ! bien, oui, Yvonne, le grand amour, l’amour qui ne mesure pas le dévouement, l’énergie féconde, la bonté suprême. Mon père, tu ne dis pas mot, mais tes yeux me prouvent que tu devines, que tu vas comprendre ! Ma petite sœur, ton cœur est sur le point de s’ouvrir, je le sens frémir au plus vibrant de ta voix ! La race canadienne-française périra d’égoïsme, si elle meurt… Je sens que mon ambition de science elle-même est trop façonnée d’orgueil impur. Ne vous offensez pas tous les deux ! Je vous accuse avec indulgence, avec peine, avec la plus vive tendresse ! Yvonne, tu es une égoïste ; tu l’es délicieusement,