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CE QUE DISAIT LA FLAMME…

pre jeunesse en lui ressuscite, les cris de fierté lancés contre le sort de nouveau l’ébranlent : le torrent d’énergie circule en ses artères avec la vivacité d’alors. Souvenances qui l’émeuvent, font perler à ses yeux une larme, la larme si bonne des regrets sans amertume : son fils lui devient cher étrangement, comme si des nuages le lui eussent voilé, comme si les ressemblances entre eux par magie se fussent illuminées. À sentir leurs âmes plus prochaines, plus identiques, à revivre en ce jeune homme qu’il croit superbe, une volupté inconnue le grise : un flot plus riche d’amour l’emporte vers Jean…

— Me permets-tu, mon Jean ? s’exclame-t-il, brusquement.

— Quoi ?

— Eh bien, oui, je ne sais comment te le dire. Ce n’est pas clair dans mon esprit… Je me sens tout curieux… Je ne me rappelle pas avoir eu le cœur comme je l’ai là !… Enfin, je suis fier de toi ! En t’entendant parler, en te voyant surtout, j’ai eu du plaisir, du gros plaisir, quelque chose de profond. Tu as un mot dont je me souviens : j’ai été pris !… Comme la vie est capricieuse ! Voici la chose que je voudrais t’expliquer : il me semble que je ne t’ai jamais connu, que je te découvre ce soir. Au fur et à mesure que tu t’instruisais, je te sentais plus loin de