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CE QUE DISAIT LA FLAMME…

tant de magnétisme, accepta l’union de leurs épargnes, de leur adresse et de leur courage. Cela n’empêcha pas les dettes mesquines dont la grimace angoissait parfois leurs cœurs à la besogne : François Bertrand, l’associé, plus timide, sans la longue initiation de Gaspard au rêve de fortune, incapable d’en être sûr avec la même passion, n’ignorait du repentir aucune phase, aucune blessure. Oh ! les jours fiévreux d’effort et d’acharnement, trop vertigineux ! Hélas ! après deux ans, les affaires trébuchèrent, un déficit les guettait au passage… Pour se tailler un modeste lopin dans le domaine de la concurrence, on avait imprudemment offert le travail à des conditions funestes. François Bertrand perdit contenance devant la guigne : sa femme, d’ailleurs, au nom de leurs deux premiers enfants, se mit jusqu’à genoux pour le ravir à Gaspard Fontaine qu’elle appelait « son mauvais génie ». Les chères économies ne s’étaient-elles pas dispersées au vent de la malchance ? François, depuis longtemps séduit par l’intention de le faire, délaissa Gaspard, et leur société croula. Celui-ci déguisa une secrète rancune avec toute l’emprise sur lui-même possible, parce qu’en somme le déserteur s’en allait délesté de sa mise, à peine rémunéré d’un travail énorme, et sans une plain-