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VI

la chanson d’isabeau


— Ces servantes !… On a beau payer pour se faire servir !… Je lui ai pourtant dit de toujours mettre mon journal ici… Elle l’a encore oublié !… On dirait que ça lui fait plaisir ! Si elle ne l’oublie pas deux fois par semaine, elle ne l’oublie jamais !… Ah ! les servantes d’aujourd’hui, quel martyre !…

Gaspard Fontaine, d’une voix coléreuse, inintelligible à certaines syllabes plus aigres, s’impatiente contre Laura, une enfant grasse et pourprée de Saint-Tite. Il vient de s’allonger avec délices aux creux vert sombre d’un fauteuil, auprès d’une table enjolivée de ciselures et d’arabesques. Il a fait, automatiquement, voluptueusement, le geste qui devait lui procurer le journal du soir, à l’endroit statué pour que la fatigue fût la plus bénigne possible. D’un regard bref, il a vérifié l’absence inexcusable. Le monologue incisif alors vint, trancha…

L’irritation se prolonge. En quelque sorte, il s’y complaît : la fureur, autant que la joie, ne s’assouvit-elle pas ? À travers les nerfs de celui