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d’Abraham, pendant lequel sa résolution acquiert plus de rigueur, Jean se dirige vers l’escalier aux rampes gracieuses. La lassitude commence à pénétrer ses membres. Sans doute, il est là, dans le salon d’où s’échappe une résonance de voix masculine, celui dont il veut faire pâlir l’auréole…

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Est-il étonnant que, depuis l’invitation d’Yvonne les rejoindre, elle et son ami, Jean ait laissé quelques minutes fuir avant de céder ? Saura-t-il voiler son antagonisme ? Il a peur que, de son enthousiasme tendu comme un arc, une parole acerbe ne parte comme une flèche et ne blesse. Certaine virulence ne sied guère à un homme bien élevé : pour s’attaquer donc au snobisme narquois de Lucien, Jean n’aura jamais assez la domination de lui-même, n’aura jamais trop à sa discrétion la lutte. L’emballement serait également funeste : la sincérité d’une noble ardeur n’en diminue pas la naïveté risible en l’esprit, de ceux qui la dédaignent. Lancé dans un combat d’escarmouches, pourra-t-il n’en pas franchir les bornes ? Eh quoi ! il n’est pas incapable de sang-froid ! ne se flatte-t-il pas d’une volonté assouplie ? Ne pas se soumettre l’appel d’Yvonne, c’est aigrir la jeune fille, émousser les arguments contre son amour, et d’ailleurs,