Page:Bernier - Au large de l'écueil, 1912.djvu/88

Cette page a été validée par deux contributeurs.
86
au large de l’écueil

violon lamentable. Deux charroyeurs se décochent des traits populaires. Jules et Marguerite, électrisés par la vie exubérante de la rue, s’abandonnent à la détente de leurs âmes. Ils s’amusent comme des enfants, se fusillent de bons mots. Le cocher, devenu loquace, est en verve, et quand la circulation lui donne un instant de loisir, il jette à ses hôtes les gerbes de son esprit pittoresque. À l’encoignure du Palais, c’est la cohue fiévreuse, la bousculade étourdissante. Les petits négociants de journaux hurlent des noms connus. Le cocher foudroie un chauffeur trop pressé de son éloquence brève. Un policier grave attend le moment d’agir. La rue de la Fabrique est en liesse, l’Hôtel de Ville est radieux, la Basilique rajeunit dans le soleil qui baisse. Le vieux Séminaire parle d’immortalité. Monseigneur de Laval est gigantesque. Le Chien d’Or ronge. Le Château Frontenac a grand air et noble stature. Les gouttelettes ruissellent dans le bassin du petit parc où les flâneurs à l’ombre font de la paresse exquise. La Cathédrale Anglicane rappelle au Palais que la justice divine et celle des hommes doivent se voisiner sans cesse. Marguerite adore Québec. On ren-