Page:Bernier - Au large de l'écueil, 1912.djvu/310

Cette page a été validée par deux contributeurs.
308
au large de l’écueil

Ces ténèbres m’écrasent, m’épouvantent, me plongent dans un vide affolant !… Brisez-les, déracinez-les, mon Dieu, rendez-moi votre soleil !… Grande Sainte, souriez-Lui, pour qu’il m’entende !… »

Escorté par le jeune acolyte, le prêtre délaisse le grand autel de marbre. Ils ont déjà disparu. Il n’y a plus, dans le sanctuaire, que le vaste silence divin autour des jeunes filles en prières. Soudain Jeanne regarde Marguerite avec une commisération de toute sa nature de sensitive extrême.

— Courage, mon amie, lui dit-elle, nous n’avons pas encore assez prié…

— J’ai plus d’espérance que jamais, lui répond l’autre, avec une conviction de toute elle-même.

— Il faut lui faire violence… Il ne faut pas trop se fier au sourire tout plein de largesses, elle veut que l’on soit bien sûr d’elle, ne cède que si on espère alors qu’il faudrait ne plus avoir espérance…

— Je ne croyais pas qu’il fût si facile de prier, Jeanne… Il est vrai que ma prière est malhabile et peu éloquente… Mais je vous obéis, j’abandonne toute mon âme à Dieu…