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au large de l’écueil

donnerait vos yeux !… Sainte-Anne de Beaupré vous sauverait !…

— Êtes-vous bien certaine ? balbutie Marguerite.

— Tellement certaine qu’elle devra vous guérir !… Je veux qu’elle agisse ! Je vais tant la prier, il faudra qu’elle m’écoute ! Mais oui, je m’étonne de ne pas y avoir songé plus tôt… Demain, je cours au sanctuaire de Beaupré, je prie jusqu’à la résurrection de vos yeux !…

— Je ne crois pas, Jeanne… Le ciel ne peut avoir pitié de moi… Merci de votre grand cœur, cela me touche infiniment…

— Ah ! si vous croyiez, cela serait tôt fait, je vous l’assure, dit la petite Québécoise, ardente, si impétueuse qu’elle vainquit les derniers scrupules de la Voltairienne.

— Eh bien, Jeanne, dit-elle, comme épouvantée de l’aveu qu’elle faisait, je devais ne pas vous le dire, le garder pour moi seule à jamais… Savez-vous ce qui m’a soulagée, rendue moins douloureuse, presque résignée au supplice d’être aveugle ?… La certitude qu’un jour la soif intense de ravissement dont mon être brûle encore,