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au large de l’écueil

Et, du geste, elle indiquait, dans le bois du Bout de l’Île, une touffe d’érables. Près du rivage, les embarcations légères se miraient dans l’eau plus sombre. La jeune fille associait l’endroit à certains paysages enchanteurs du lac Majeur. À gauche, la pointe gracieuse de Saint-Joseph de Lévis masquait encore la ville. Un silence presque général se fit soudain parmi les passagers : ils attendaient, avec une émotion mystérieuse, la révélation de Québec.

— C’est l’érable, Madame, avait répondu le jeune homme. Il est l’orgueil de nos forêts… La feuille d’érable est sacrée, chez nous… L’automne, elle se pare de mille couleurs avant de mourir… La neige la recouvre, mais elle est toujours vivante dans nos cœurs…

Maple leaf for ever, disent vos frères les Anglais, remarqua la jeune fille.

— Oui, Mademoiselle, le Canada toujours !…

— Le Canada n’aura donc jamais le sort de ce navire qui gît en deux tronçons ?… Savez-vous comment il est là ? demanda Marguerite.

— C’est le squelette du « Bavarian », un grand paquebot de la Compagnie Allan… Cela remonte à quelques années Vous vous souvenez des