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au large de l’écueil

millons qui jalonnent le sol tout le long de la lisière.

Soudain, l’ascension est facile et repose. La pente a cessé d’être escarpée, il n’y a plus de racines sournoises ni de pierres hostiles. Les trois amis foulent, avec ils ne savent quelle volupté, le tapis moëlleux des aiguillettes brunes ou dorées que les conifères ont semées dans la forêt profonde. Marguerite pressent qu’ils arrivent, et sa lassitude l’abandonne.

— Bientôt, la grande Croix se dressera devant nous, s’écrie Jeanne, avec une joie dont pétille son visage plus rose qu’à l’ordinaire. Ce sera presque la fin… N’êtes-vous pas heureuse, Marguerite, que ce soit la fin ?…

— Oui, je grille du désir de voir le spectacle dont vous m’avez promis la splendeur, dit-elle, s’efforçant de sourire, parce qu’elle pense à l’autre fin, celle de son amour.

— J’espère qu’on ne vous a pas trop promis, murmure Jeanne, qui comprend…

— Il vaut mieux ne pas trop promettre, si on veut épargner la déception amère, ajoute Jules, dont le silence, tout le long de la montée, a suivi