vent encore, ici et là, des fougères au dessin frêle et aux tiges menues. Tout-à-l’heure, ils étaient accueillis par les hêtres efflanqués, les bouleaux minces et les érables un peu mélancoliques dans leur feuillage qui sent venir, plus tôt que les autres, l’automne et la mort. Il n’y a guère, maintenant, que la grande taille des épinettes et les bras ouverts des sapins qui les saluent au passage. À tout moment, ils entendaient gazouiller les sources dans les verdures attendries : plus ils gravissaient la montagne, plus elles sont devenues rares, et il leur semble qu’il ne doit plus y en avoir. La montée se prolonge, accidentée, pénible, un peu énervante. Les racines qui s’enlacent au ras du sentier, accrochent les pieds qu’elles taquinent. Il faut se heurter aux roches anguleuses, sentir la pointe des cailloux effilés, déchirer les toiles d’araignée dont la trame colle au visage, franchir un arbre dont l’orage de l’année dernière a jonché la route. Parfois, ils s’arrêtent : un parfum de mille arômes apaise leur sang qui bat à grands coups martelés. Le vol sous bois d’un geai d’azur, tout près d’eux, leur donne des ailes, et ils reprennent le chemin tortueux, l’œil ébloui par les « quatre-temps » ver-
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au large de l’écueil