Page:Bernier - Au large de l'écueil, 1912.djvu/179

Cette page a été validée par deux contributeurs.
177
au large de l’écueil

tation du beau vieillard. Jules et son père écoutent avec un saisissement de tout leur être. Ils ne distinguent pas encore les cris dont le tumulte vibre, mais la brise leur apporte une vague d’enthousiasme. Un instant, le doute les empoigne au vif d’eux-mêmes, et Jules a peur. Le bruit s’approche, on va bientôt savoir quelle est la vocifération monstrueuse.

— J’ai compris, on t’acclame, Jules, dit l’abbé, que l’allégresse ramène aux délires de vingt ans. Augustin Hébert est remué jusqu’en ses entrailles profondes. Jules, une seconde, éprouve au cerveau comme une sensation de folie.

— Vive Hébert ! Vive le Patriote ! hurlent des centaines de poitrines glapissantes. D’abord masqués du presbytère, un pêle-mêle d’hommes et d’enfants débouchent de la rue principale. Des mains battent l’air, des chapeaux volent au ciel, des gamins se bousculent à l’avant-garde, des chiens jappent aux nues, et de la masse grouillante que le chef de cabale domine, un refrain, qui ne se calme que pour renaître avec une passion plus aiguë, rugit dans l’espace : « Vive Hébert ! Vive le Patriote ! »

Jules Hébert, haletant, se grise de l’acclama-