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au large de l’écueil

gent que domine un aigle, la brochure ouverte et délaissée, la Madone minuscule et suave. D’où vient-elle ainsi, la paix des choses ? Prend-elle sa source dans le cœur du prêtre dont la main repose sur le bras sculpté du plus grand des fauteuils sombres ? Plus on regarde le vieillard, plus on pense qu’elle émane de lui. Elle semble couler à flots du visage classiquement fier et beau. Tout ce qu’il y a de plus noble et de meilleur en l’homme illumine les traits forts. La bouche frissonne d’une bonté sans limites. Des lueurs d’âme pure souvent passent dans les yeux de velours noir où les visions de l’au-delà ont semé une douceur infinie. Une abondante moisson pousse au front que des éclairs à tout moment sillonnent d’intelligence, et les tiges en ont blanchi au labeur sublime et aux amours sans tache. La courbe du nez seule trahit les colères qu’un sang trop vif allume parfois dans les veines, et ce visage alors doit se transfigurer d’une flamme terrible. Mais il est impossible d’en douter, la source, où les choses s’abreuvent de paix surabondante, est le cœur du vieillard pensif.

Les mains croisées sur sa poitrine encore puissante, il a l’air d’abandonner son âme à des cho-