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au large de l’écueil

empoigne leurs cœurs d’allégresse. L’âme des tuyaux sonores gronde, longe la corniche ciselée de choses fines, frappe aux profondeurs pâles de l’abside, revient par les murs dans la nef qu’elle inonde et va mourir quelque part dans les couloirs des chapelles. Une voix de stentor entonne un verset d’amour, et les invocations se taisent sur les lèvres qui les gesticulent. Elle est large et foudroyante, arrache du silence les échos les plus lointains de la Basilique. Elle ébranle tout sur sa route, et les pèlerins sentent qu’elle ramasse leurs fervents appels et leurs hommages pour les offrir tous à l’Éternel en une supplication une et toute-puissante. Elle cesse, et de nouveau la prière bruit de toutes parts, glisse dans les cannelures des colonnes altières, effleure l’entablement aux riches découpures et, pour s’élever jusqu’à l’au-delà, perce la voûte où l’azur est semé d’étoiles d’or et de trèfles sanglants.

Marguerite, debout près de Jules Hébert qui la domine, est fascinée par la campagne canadienne-française en prières. La fille de Gilbert l’athée ne trouve en son esprit sceptique aucun sarcasme, aucune boutade. Elle n’a que du res-