Louise Buguet était ma camarade préférée. Je m’approchai d’elle et lui demandai son manuscrit que je relus avec passion.
« Tu me feras répéter par cœur, dis ? — Oui, bien sûr, lui répondis-je. — Oh ! que je vais avoir peur ! », disait ma petite amie.
On l’avait choisie pour l’ange, je pense, parce qu’elle était blanche et blonde comme un rayon de lune… Elle avait la voix douce et timide ; et parfois nous la faisions pleurer pour voir comme elle était jolie. De ses grands yeux gris et questionneurs, les larmes coulaient limpides et perlées.
Elle se mit de suite à apprendre sa part. Moi, je faisais le chien de berger, allant de l’une à l’autre des élues. Ça ne me regardait pas, mais je voulais en être.
Mère Supérieure passa ; et comme nous faisions la révérence, elle me caressa la joue : « On avait bien pensé à toi, ma fillette, mais tu es si peureuse quand on t’interroge. — Oh ! c’est parce que c’est l’histoire ou l’arithmétique… Ce n’est pas la même chose, j’aurais pas eu peur. »
Elle sourit d’un air défiant et s’éloigna.
On répéta pendant huit jours. Moi, je demandai à faire le gros monstre. Je voulais en être à tout prix. Mais c’était César, le chien du couvent, qui devait faire le poisson monstre.
On mit au concours le costume du poisson.
Je m’étais donné un mal !… J’avais découpé des écailles de carton que j’avais peinturlurées. Je les avais toutes cousues ensemble. J’avais fait des ouïes énormes qu’on devait passer en collier à César.
Ce ne fut pas mon projet qui fut adopté, mais celui d’une grande fille bête, dont le nom m’échappe. Elle avait fait une grande queue de peau et un masque