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son père avec les viscères du poisson. — Le vieux père recouvre la vue. — L’ange Raphaël, pressé par Tobie d’accepter une récompense, dévoile qui il est. — Et dans un cantique à la gloire de Dieu, il disparaît vers le ciel.


La petite pièce fut lue par mère Sainte-Thérèse dans la salle du jeudi. Nous étions toutes en larmes après la lecture, et mère Sainte-Thérèse dut faire un grand effort pour ne pas commettre, fût-ce une seconde, le péché d’orgueil.

Je me demandais avec anxiété quelle part j’allais prendre dans cette pieuse comédie ; car je ne doutais pas, étant donné ma petite personnalité, qu’on m’eût distribué quelque chose. Et j’en tremblais d’avance. Et je m’énervais toute seule, et mes mains se glaçaient, et mon cœur battait, et mes tempes bourdonnaient.

Aussi, quand mère Sainte-Thérèse dit de sa voix calme : « Mesdemoiselles, écoutez, je vous prie : voici la distribution de vos parts », je refusai de m’approcher et restai boudeuse sur mon tabouret.

Elle fit l’appel :


Le vieux Tobie : Eugénie CHARMEL.

Le jeune Tobie : Amélia PLUCHE.

Gabélus : Renée d’ARVILLE.

L’ange Raphaël : Louise BUGUET.

La mère de Tobie : Eulalie LACROIX.

La sœur de Tobie : Virginie DEPAUL.


J’avais prêté une oreille sournoise ; et je restai confondue, outrée, furieuse, quand mère Sainte-Thérèse ajouta : « Voici vos manuscrits. Mesdemoiselles. » Et on remit à chacune un petit manuscrit de la pièce.