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avec des amis choisis. Quant aux églises et autres monuments, cela m’assomme d’entrer dedans. Je n’y peux rien. Cela m’assomme !... Je ne veux pas en visiter.

Admirer leur silhouette en passant, les voir se profiler dans une couche de soleil, soit !... c’est tout ce qu’on peut exiger de moi. Mais entrer dans des salles froides pendant qu’on m’explique quelque absurde et interminable histoire ; me fatiguer à regarder les plafonds ; cramponner mes pieds sur des planchers trop cirés ; entendre admirer la restauration de cette aile alors que j’eusse préféré qu’on la laissât s’effriter ; me faire admirer les profondeurs de fossés qui, autrefois, étaient pleins d’eau et sont maintenant secs comme vent du Nord, d’Est... tout cela m’assomme à hurler !

D’abord, je déteste, depuis mon enfance, les maisons, les châteaux, les églises, les tours, enfin tous les édifices dépassant la hauteur d’un moulin. J’aime les cahutes, les fermes basses ; et j’adore les moulins parce que ces petites constructions ne voilent pas l’horizon. — Je ne dis pas de mal des Pyramides ; mais je préférerais cent fois qu’on ne les eût pas élevées.

Je suppliai Duquesnel d’envoyer vite des dépêches à toutes ces notabilités si complaisantes. Nous passâmes deux heures à ce travail, et je partis le 3 septembre, libre, joyeuse, contente.

Je reçus les visites de mes amis selon le tour que leur avait indiqué le tirage au sort ; et nous fîmes de grandes parties en coach dans les campagnes entourant les villes où je jouais.


Rentrée à Paris le 30 septembre, je n’eus que le temps de préparer mon départ pour l’Amérique. Je