dans les salons ; car la note fut envoyée à Mayer avec prière de la faire paraître dans les journaux anglais, Je tiens ce détail de Mayer lui-même.
Toutes querelles terminées, nous commençâmes nos préparatifs pour le départ.
Je n’avais jamais fait la moindre traversée en mer quand fut décidé le voyage à Londres par les artistes de la Comédie-Française. L’ignorance voulue des Français pour tout ce qui est étranger était beaucoup plus sensible à cette époque qu’elle ne l’est aujourd’hui.
Donc, je me fis faire un manteau très chaud. On m’avait affirmé que la traversée était glaciale, même en plein été, et je l’avais cru.
On m’apportait de tous côtés des bonbons contre le mal de mer ; des opiacés contre le mal de tête ; du papier de soie pour me mettre dans le dos ; des petits cataplasmes compressifs pour me mettre sur le diaphragme ; et des semelles goudronnées pour mettre dans mes souliers, car il ne fallait pas, surtout, prendre froid aux pieds.
Oh ! que cela était drôle et amusant ! Et je prenais tout. J’écoutais toutes les recommandations. Je croyais à tout.
Mais ce qui fut le plus inénarrable, ce fut l’apport sur le bateau, cinq minutes avant le départ, d’une énorme caisse très légère. Elle était tenue à la main par un grand jeune homme, devenu aujourd’hui un homme remarquable, ayant toutes les croix, tous les honneurs, une fortune colossale et une outrecuidante vanité. Il était à ce moment-là un timide inventeur : jeune, triste et pauvre, le nez toujours dans des livres traitant de questions abstraites, il ignorait tout de la vie.