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journée à leurs travaux à l’aiguille ; les unes faisaient de la tapisserie ; d’autres, de la broderie ; d’aucunes s’occupaient à la décalcomanie, etc., etc.

La salle était grande. On y dansait le jour de la Sainte-Catherine et à quelques autres occasions.

C’était dans cette salle aussi qu’une fois par an, la mère Supérieure remettait à chaque sœur le sou qui représentait son revenu de l’année.

Les murs étaient ornés de gravures pieuses et de quelques tableaux à l’huile faits par des élèves. Mais la place d’honneur appartenait à saint Augustin : Une grande et magnifique gravure représentait la conversion de saint Augustin.

Oh ! que je l’ai regardée souvent, cette gravure ! Sûrement, ce saint Augustin me donnait de grandes émotions et troublait mon cœur d’enfant.

Puis, maman admira la propreté du réfectoire ; mais elle demanda à voir quelle serait ma place ; et quand on la lui eut montrée, elle se refusa énergiquement à ce que je fusse placée à l’endroit indiqué. « Non, dit-elle, l’enfant est très faible de poitrine, elle serait en plein courant d’air. Je ne veux pas qu’elle soit là. » Et mon père insistant dans le sens de ma mère, il fut convenu qu’on me placerait au fond du réfectoire. Du reste, on tint parole.

Quand il fallut monter le large escalier qui conduisait aux dortoirs, maman resta une seconde effarée : l’escalier était large, large… les marches basses et faciles… mais il y en avait une telle quantité pour arriver au premier étage…

Un instant, les bras tombants, l’œil fixe, maman regarda, découragée, hésitante. « Reste, Youle, dit ma tante, je monterai. — Non, non, dit maman d’une voix