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Mais revenons au Conservatoire.

Presque tous les élèves étaient partis. Je restais silencieuse et confuse sur mon banc. Marie Lloyd vint s’asseoir près de moi. « Tu as du chagrin ? — Oui, je voulais avoir le premier prix, et c’est toi qui l’as. Ce n’est pas juste ! — Je ne sais pas si c’est juste ou non, répliqua Marie Lloyd, mais je te jure que je ne l’ai pas fait exprès ! »

Je ne pus m’empêcher de rire.

« Veux-tu que j’aille déjeuner chez toi ?» Et son beau regard devint humide et suppliant. Elle était orpheline et pas heureuse ; et elle avait besoin, en ce jour de triomphe, d’un peu de famille.

Je sentis mon cœur se fondre en une infinie et tendre pitié. Je lui sautai au cou et nous partîmes toutes les quatre : Marie Lloyd, Mme Guérard, Mlle de Brabender et moi. Maman m’avait fait dire qu’elle m’attendait à la maison.

Dans la voiture, mon caractère « j’m’enfichiste »