I
Ma mère adorait voyager. Elle allait d’Espagne en Angleterre ; de Londres à Paris ; de Paris à Berlin. De là, à Christiania ; puis revenait m’embrasser et repartait pour la Hollande, son pays natal.
Elle envoyait à ma nourrice : des vêtements pour elle, et des gâteaux pour moi.
Elle écrivait à une de mes tantes : « Veille sur la petite Sarah, je reviendrai dans un mois. » Elle écrivait à une autre de ses sœurs, un mois après : « Va voir l’enfant chez sa nourrice, je reviens dans quinze jours. »
Ma mère avait dix-neuf ans, j’en avais trois ; et mes tantes avaient : l’une dix-sept ans, l’autre vingt ans. Une autre avait quinze ans, et l’aînée vingt-huit ans ; mais cette dernière habitait la Martinique et avait déjà six enfants.
Ma grand’mère était aveugle. Mon grand-père était mort ; et mon père était en Chine depuis deux ans. Pourquoi ? Je n’en sais rien.