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dans les nuages.

Je regardai ce que pouvait être ce guide-rope et je vis se dérouler une longue corde à laquelle étaient fixés de petits crampons de fer de distance en distance. Le jeune peintre et la comédienne se mirent courageusement à l’œuvre pour aider l’aéronaute. La corde avait 120 mètres de long. Godard, penché en dehors de la nacelle, la regardait se dérouler, pendant que Clairin et doña Sol la faisaient glisser doucement entre leurs mains, arrêtant son essor trop violent et riant quand l’un d’eux s’était piqué aux crochets. Enfin, la corde déroulée, Godard prit la longue-vue.

— Diable ! voilà bien des arbres, murmura-t-il.

En effet, à ce moment le ballon était au-dessus d’un très petit bois ; en face une plaine, et puis des bois à perte de vue. Après s’être orienté, l’aéronaute déclara qu’il fallait absolument descendre dans la plaine, sinon nous risquions de faire une descente en pleine nuit au milieu des bois de Ferrières. Il fallut prendre un parti. Doña Sol eut le grand plaisir d’ouvrir toute grande la soupape. Le gaz s’échappa du ballon d’un petit air moqueur en sifflant. Puis la soupape refermée, nous descendîmes assez rapidement. Quand nous fûmes à 500 mètres, Louis Godard sortit d’une de ses poches (véritables magasins) une petite trompe et se mit à souffler dedans avec violence.

— Ah ! mon Dieu ! je manque mon entrée, s’écria doña Sol.