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donnoit le mouvement et la vie. Bientôt à la surface de ses mers fluides, demi-épuisées par les mers aëriennes et glaciales, qui en étoient sorties, apparurent les sommets graniteux de ses continents et de ses isles, comme les premiers ossements de son squelette.

Peu à peu ses eaux marines saturées de lumiere et de sels, étendirent autour d’eux leurs alluvions, et les transformerent en vastes couches de roches calcaires, comme les eaux aëriennes se changent en bois dans les végétaux, et la seve des végétaux en sang, en chair dans les animaux. Ainsi se formerent dans la région des tempêtes, les rochers et les durs minéraux, ces ossements et ces nerfs de la terre, où devoient s’attacher comme des muscles les vastes croupes des montagnes, et qui devoient supporter le poids des continents. Leurs fondements caverneux, et encore mal assis, en paraissant à la lumiere, se raffermirent par des tremblements ; et de leurs affreuses collisions, des tourbillons de fumée s’éleverent à la surface des mers, qui annoncerent les premiers volcans dont les feux devoient les épurer.

D’autres bouleversements préparerent d’autres organisations ; le globe surchargé sur ses poles de deux océans de glace de poids inégaux et versatile, les présenta tour-à-tour au soleil ; et tour-à-tour de vastes courants en sortirent qui labourerent, chacun pendant six mois, ses deux hémispheres.