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Moi. Si jamais vous entreprenez des feuilles périodiques, faites-les dignes d’une ame généreuse et des hautes destinées où s’éleve la France. Encouragez, à leur naissance, les talents timides, en vous rappelant les foibles débuts de Corneille, de Racine, et de Fontenelle. Préparez au siecle nouveau des artistes, des poëtes, des historiens. Ce n’est point de héros dont il manque, c’est d’écrivains capables de les célébrer. N’insérez dans vos feuilles que ce qui méritera les souvenirs de la postérité. Mettez-y les découvertes du génie et les actes de vertu en tout genre. Ne craignez pas que vos jeunes talents fléchissent sous de si nobles fardeaux ; ils n’en prendront qu’un vol plus assuré ; et la reconnoissance des races futures suffira pour les rendre illustres. Vos feuilles deviendront pour la France ce que sont depuis tant de siecles pour la Chine les annales de son empire.

En parcourant cette carriere, que vous indique l’amour de la patrie, étendez de temps en temps vos regards sur les autres parties du monde, votre journal renfermera un jour les archives du genre humain.

Mon jeune ami se leva, me serra la main, et se retira plein d’émotion.

Pour moi je redoublai de zele pour mon édition de Paul et Virginie. Les plus célebres artistes s’en occupoient. J’éprouvai d’abord plusieurs mois de retard à l’occasion de quelques uns