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ET VIRGINIE

pas que, quelque longue que soit la lettre d’une femme, elle n’y met jamais sa pensée la plus chere qu’à la fin.

Dans un post-scriptum Virginie recommandoit particulierement à Paul deux especes de graines ; celles de violettes et de scabieuses. Elle lui donnoit quelques instructions sur les caracteres de ces plantes, et sur les lieux les plus propres à les semer. « La violette, lui mandoit-elle, produit une petite fleur d’un violet foncé, qui aime à se cacher sous les buissons ; mais son charmant parfum l’y fait bientôt découvrir ». Elle lui enjoignoit de la semer sur le bord de la fontaine, au pied de son cocotier. « La scabieuse, ajoutoit-elle, donne une jolie fleur d’un bleu mourant, et à fond noir piqueté de blanc. On la croiroit en deuil. On l’appelle aussi, pour cette raison, fleur de veuve. Elle se plaît dans les lieux âpres et battus des vents ». Elle le prioit de la semer sur le rocher où elle lui avoit parlé la nuit, la derniere fois, et de donner à ce rocher, pour l’amour d’elle, le nom du Rocher des Adieux.

Elle avoit renfermé ces semences dans une petite bourse dont le tissu étoit fort simple, mais qui parut