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devois verser dans l’édition que je me proposois de faire. Mais deux ans et demi se sont écoulés sans que j’aie entendu parler de lui, quelques recherches que j’en aie faites.

Il y a environ dix-huit mois qu’un imprimeur-libraire de Paris me fit la même proposition pour Bruxelles : j’y consentis. Il traita de frippon et de vagabond celui que j’avois chargé à Lyon de mes intérêts. À peine arrivé à Bruxelles, il me manda qu’il avoit saisi plusieurs de mes ouvrages contrefaits ; et après m’avoir engagé à employer mon crédit pour lui faire obtenir des jugements de condamnation, je n’en ai pas plus entendu parler que de l’autre.

J’avois sans doute compté sur des fonds moins casuels pour entreprendre une édition de Paul et Virginie. Engagé depuis huit ans dans des procès à l’occasion de la succession du pere de ma premiere femme ; et voyant que les créanciers de cette succession, non contents de la dévorer en frais, quoique déclarée par la justice plus que suffisante pour en acquitter les dettes, avoient jeté leurs hypotheques sur mes biens propres, quelque peu considérables qu’ils fussent, j’avois craint que l’incendie ne se portât vers l’avenir, et ne consumât jusqu’aux espérances patrimoniales de mes enfants. J’avois donc rassemblé tout ce que j’avois d’argent comptant, et je l’avois placé dans la caisse d’escompte du commerce, pour leur servir après moi de derniere ressource, ainsi qu’à ma seconde femme,