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ET VIRGINIE

simples ; ni menteur, n’ayant aucune vérité à dissimuler. On ne les avoit jamais effrayés en leur disant que Dieu réserve des punitions terribles aux enfants ingrats ; chez eux l’amitié filiale étoit née de l’amitié maternelle. On ne leur avoit appris de la religion que ce qui la fait aimer ; et s’ils n’offroient pas à l’église de longues prieres, par-tout où ils étoient, dans la maison, dans les champs, dans les bois, ils levoient vers le ciel des mains innocentes et un cœur plein de l’amour de leurs parents.

Ainsi se passa leur premiere enfance comme une belle aube qui annonce un plus beau jour. Déja ils partageoient avec leurs meres tous les soins du ménage. Dès que le chant du coq annonçoit le retour de l’aurore, Virginie se levoit, alloit puiser de l’eau à la source voisine, et rentroit dans la maison pour préparer le déjeûner. Bientôt après, quand le soleil doroit les pitons de cette enceinte, Marguerite et son fils se rendoient chez madame de la Tour : alors ils commençoient tous ensemble une priere, suivie du premier repas ; souvent ils le prenoient devant la porte, assis sur l’herbe sous un berceau de bananiers, qui leur