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ainsi que l’expérience, qui vient à chaque pas montrer au savant que sa connaissance est bornée, n’étouffe pas en lui son sentiment naturel, qui le porte à croire que la vérité absolue est de son domaine. L’homme se comporte instinctivement comme s’il devait y parvenir, et le pourquoi incessant qu’il adresse à la nature en est la preuve.

Il serait du reste mauvais pour la science que la raison ou l’expérience vînt étouffer complétement le sentiment ou l’aspiration vers l’absolu. Le savant dépasserait alors le but de la méthode expérimentale, comme celui qui, pour redresser une branche vers une meilleure direction, la romprait, et ferait cesser en elle toute séve et toute végétation. En effet, on le verra plus loin, c’est cette espérance de la vérité, constamment déçue, constamment renaissante, qui soutient et soutiendra toujours les générations successives dans leur ardeur passionnée à étudier les phénomènes de la nature.

Le rôle particulier de la science expérimentale est de nous apprendre que nous ignorons,