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n’est pas scientifique de poser la question du pourquoi : cela ne peut en effet que nous égarer dans des questions insolubles et sans applications. Serait-ce pour se moquer de cette tendance antiscientifique de la médecine qui résulte de l’absence du sentiment de cette limite de nos connaissances que Molière a mis dans la bouche de son candidat docteur, à qui l’on demandait pourquoi l’opium fait dormir, la réponse suivante : Quia est in eo virtus dormitiva, cujus est natura sensus assoupire ? Cette réponse paraît plaisante ou absurde ; elle est cependant la seule qu’on pourrait faire.

De même, si l’on voulait répondre à cette question : « Pourquoi l’hydrogène, en se combinant avec de l’oxygène, fait-il de l’eau ? » on serait obligé de dire : « Parce qu’il y a dans l’hydrogène une propriété capable d’engendrer l’eau. »

C’est donc seulement la question du pourquoi qui est absurde, puisqu’elle entraîne une réponse qui paraît naïve ou ridicule. Il vaut mieux reconnaître que nous ne savons pas, et que c’est là que se place la limite de notre