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Quand, au lieu d’une jambe, on ne préserve de l’empoisonnement qu’un seul doigt, ce doigt s’agite et exprime le sentiment de tout le corps réduit à l’état de cadavre.

Le spectacle intéressant que je viens de tracer peut s’observer parfois pendant une heure ou deux dans les saisons favorables. Il ne cesse que lorsque l’asphyxie et la mort de l’organisme sont arrivées par suite de la suppression trop prolongée des mouvements respiratoires.

Chez les animaux à sang chaud, ces phénomènes se passent en un temps beaucoup plus court, mais ils n’en existent pas moins.

Lorsqu’un mammifère ou un homme est empoisonné par le curare, l’intelligence, la sensibilité et la volonté ne sont point atteintes par le poison, mais elles perdent successivement les instruments du mouvement, qui refusent de leur obéir. Les mouvements les plus expressifs de nos facultés disparaissent les premiers, d’abord la voix et la parole, ensuite les mouvements des membres, ceux de la face et du thorax, et enfin les mouvements des yeux qui, comme chez les mourants, persistent les derniers.