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effet, dans ce corps sans mouvement, derrière cet œil terne, et avec toutes les apparences de la mort, la sensibilité et l’intelligence persistent encore tout entières. Le cadavre que l’on a devant les yeux entend et distingue ce que l’on fait autour de lui, il ressent des impressions douloureuses quand on le pince ou qu’on l’excite. En un mot, il a encore le sentiment et la volonté, mais il a perdu les instruments qui servent à les manifester : c’est ce que nous allons montrer en poussant plus loin notre analyse physiologique.

Rappelons-nous pour un instant que le curare ne peut exercer son action toxique qu’après avoir été porté par les artères et mis en contact avec nos éléments organiques. Rappelons-nous encore qu’en liant ou en obstruant une artère d’un membre ou d’une autre partie du corps, on peut ainsi préserver cette partie de l’empoisonnement qui envahira tout le reste de l’organisme. Or à l’aide de ce membre ou de cette partie réservée, ne fût-ce même que d’une fibre musculaire, l’animal pourra manifester ce qu’il sent et montrer que son intelligence, qui