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du raisonnement expérimental.

chercher la vérité et en approcher autant que possible. En effet, par sa nature même de critérium extérieur et inconscient, l’expérience ne donne que la vérité relative sans jamais pouvoir prouver à l’esprit qu’il la possède d’une manière absolue.

L’expérimentateur qui se trouve en face des phénomènes naturels ressemble à un spectateur qui observe des scènes muettes. Il est en quelque sorte le juge d’instruction de la nature ; seulement, au lieu d’être aux prises avec des hommes qui cherchent à le tromper par des aveux mensongers ou par de faux témoignages, il a affaire à des phénomènes naturels qui sont pour lui des personnages dont il ne connaît ni le langage ni les mœurs, qui vivent au milieu de circonstances qui lui sont inconnues, et dont il veut cependant savoir les intentions. Pour cela il emploie tous les moyens qui sont en sa puissance. Il observe leurs actions, leur marche, leurs manifestations, et il cherche à en démêler la cause au moyen de tentatives diverses, appelées expériences. Il emploie tous les artifices imaginables et, comme on le dit vulgairement, il plaide souvent le faux pour savoir le vrai. Dans tout cela l’expérimentateur raisonne nécessairement d’après lui-même et prête à la nature ses propres idées. Il fait des suppositions sur la cause des actes qui se passent devant lui, et, pour savoir si l’hypothèse qui sert de base à son interprétation est juste, il s’arrange pour faire apparaître des faits, qui, dans l’ordre logique, puissent être la confirmation ou la négation de l’idée qu’il a conçue. Or, je le répète, c’est ce contrôle logi-