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applications de la méthode expérimentale.

médité, ainsi que Bacon lui-même, n’y ont guère réussi. C’est qu’en effet ces procédés et ces méthodes scientifiques ne s’apprennent que dans les laboratoires, quand l’expérimentateur est aux prises avec les problèmes de la nature ; c’est là qu’il faut diriger d’abord les jeunes gens ; l’érudition et la critique scientifique sont le partage de l’âge mûr ; elles ne peuvent porter des fruits que lorsqu’on a commencé à s’initier à la science dans son sanctuaire réel, c’est-à-dire dans le laboratoire. Pour l’expérimentateur, les procédés du raisonnement doivent varier à l’infini, suivant les diverses sciences et les cas plus ou moins difficiles et plus ou moins complexes auxquels il les applique. Les savants, et même les savants spéciaux en chaque science, peuvent seuls intervenir dans de pareilles questions, parce que l’esprit du naturaliste n’est pas celui du physiologiste, et que l’esprit du chimiste n’est pas non plus celui du physicien. Quand des philosophes, tels que Bacon ou d’autres plus modernes, ont voulu entrer dans une systématisation générale des préceptes, pour la recherche scientifique, ils ont pu paraître séduisants aux personnes qui ne voient les sciences que de loin ; mais de pareils ouvrages ne sont d’aucune utilité aux savants faits, et pour ceux qui veulent se livrer à la culture des sciences, ils les égarent par une fausse simplicité des choses ; de plus, ils les gênent en chargeant l’esprit d’une foule de préceptes vagues ou inapplicables, qu’il faut se hâter d’oublier si l’on veut entrer dans la science et devenir un véritable expérimentateur.

Je viens de dire que l’éducation du savant et de l’ex-