Page:Bernard - Introduction à l’étude de la médecine expérimentale, Baillière, 1865.djvu/398

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
392
applications de la méthode expérimentale.

systématiques : elles doivent être unies sans vouloir se dominer l’une l’autre. Leur séparation ne pourrait être que nuisible aux progrès des connaissances humaines. La philosophie, tendant sans cesse à s’élever, fait remonter la science vers la cause ou vers la source des choses. Elle lui montre qu’en dehors d’elle il y a des questions qui tourmentent l’humanité, et qu’elle n’a pas encore résolues. Cette union solide de la science et de la philosophie est utile aux deux, elle élève l’une et contient l’autre. Mais si le lien qui unit la philosophie à la science vient à se briser, la philosophie, privée de l’appui ou du contrepoids de la science, monte à perte de vue et s’égare dans les nuages, tandis que la science, restée sans direction et sans aspiration élevée, tombe, s’arrête ou vogue à l’aventure.

Mais si, au lieu de se contenter de cette union fraternelle, la philosophie voulait entrer dans le ménage de la science et la régenter dogmatiquement dans ses productions et dans ses méthodes de manifestation, alors l’accord ne pourrait plus exister. En effet, ce serait une illusion que de prétendre absorber les découvertes particulières d’une science au profit d’un système philosophique quelconque. Pour faire des observations, des expériences ou des découvertes scientifiques, les méthodes et procédés philosophiques sont trop vagues et restent impuissants ; il n’y a pour cela que des méthodes et des procédés scientifiques souvent très spéciaux qui ne peuvent être connus que des expérimentateurs, des savants ou des philosophes qui pratiquent une science déterminée. Les connaissances humaines sont tellement enche-