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exemples de critique expérimentale physiologique.

minaison d’une maladie, si préalablement on ne connaît la marche et la terminaison naturelles de cette maladie. C’est pourquoi Pinel disait dans sa clinique : Cette année nous observerons les maladies sans les traiter, et l’année prochaine nous les traiterons. On doit scientifiquement adopter l’idée de Pinel sans cependant admettre cette expérience comparative à longue échéance qu’il proposait. En effet, les maladies peuvent varier dans leur gravité d’une année à l’autre ; les observations de Sydenham sur l’influence indéterminée ou inconnue de ce qu’il appelle le génie épidémique sont là pour le prouver. L’expérience comparative exige donc, pour être valable, d’être faite dans le même temps et sur des malades aussi comparables que possible. Malgré cela, cette comparaison est encore hérissée de difficultés immenses que le médecin doit chercher à diminuer ; car l’expérience comparative est la condition sine qua non de la médecine expérimentale et scientifique, autrement le médecin marche à l’aventure et devient le jouet de mille illusions. Un médecin qui essaye un traitement et qui guérit ses malades est porté à croire que la guérison est due à son traitement. Souvent des médecins se vantent d’avoir guéri tous leurs malades par un remède qu’ils ont employé. Mais la première chose qu’il faudrait leur demander, ce serait s’ils ont essayé de ne rien faire, c’est-à-dire de ne pas traiter d’autres malades ; car, autrement, comment savoir si c’est le remède ou la nature qui a guéri ? Gall a écrit un livre assez peu connu[1]

  1. Gall, Philosophische medicinische Untersuchungen über Kunst und Natur im gesunden und kranken Zustand des Menschen. Leipzig, 1800.