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applications de la méthode expérimentale.

rencontre est en opposition avec une théorie régnante, il faut accepter le fait et abandonner la théorie, lors même que celle-ci, soutenue par de grands noms, est généralement adoptée.

Il faut donc distinguer, comme nous l’avons dit, les principes d’avec les théories et ne jamais croire à ces dernières d’une manière absolue. Ici nous avions une théorie d’après laquelle on admettait que le règne végétal avait seul le pouvoir de créer les principes immédiats que le règne animal doit détruire. D’après cette théorie établie et soutenue par les chimistes contemporains les plus illustres, les animaux étaient incapables de produire du sucre dans leur organisme. Si j’avais cru à la théorie d’une manière absolue, j’aurais dû conclure que mon expérience devait être entachée d’erreur, et peut-être que des expérimentateurs moins défiants que moi auraient passé condamnation immédiatement et ne se seraient pas arrêtés plus longtemps sur une observation qu’on pouvait théoriquement accuser de renfermer des causes d’erreurs, puisqu’elle montrait du sucre dans le sang chez les animaux soumis à une alimentation dépourvue de matières amidonnées ou sucrées. Mais, au lieu de me préoccuper de la validité de la théorie, je ne m’occupai que du fait dont je cherchai à bien établir la réalité. Je fus ainsi amené par de nouvelles expériences et au moyen de contre-épreuves convenables à confirmer ma première observation et à trouver que le foie était un organe où du sucre animal se formait dans certaines circonstances données pour se répandre ensuite dans toute la masse