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applications de la méthode expérimentale.

vette contenant de l’oxyde de carbone, j’agitai ensuite le tout afin d’empoisonner le sang à l’abri du contact de l’air extérieur. Puis après un certain temps j’examinai si l’air contenu dans l’éprouvette, en contact avec le sang empoisonné, avait été modifié, et je constatai que cet air en contact avec le sang s’était notablement enrichi en oxygène, en même temps que la proportion d’oxyde de carbone y avait diminué. Ces expériences, répétées dans les mêmes conditions, m’apprirent qu’il y avait eu là un simple échange volume à volume entre l’oxyde de carbone et l’oxygène du sang. Mais l’oxyde de carbone, en déplaçant l’oxygène qu’il avait expulsé du sang, était resté fixé dans le globule du sang et ne pouvait plus être déplacé par l’oxygène ni par d’autres gaz. De sorte que la mort arrivait par la mort des globules sanguins, ou autrement dit par la cessation de l’exercice de leur propriété physiologique qui est essentielle à la vie.

Ce dernier exemple, que je viens de rapporter d’une manière très succincte, est complet, et il montre d’un bout à l’autre comment la méthode expérimentale procède et réussit pour arriver à connaître la cause prochaine des phénomènes. D’abord je ne savais absolument rien sur le mécanisme du phénomène empoisonnement par l’oxyde de carbone. Je fis une expérience pour voir, c’est-à-dire pour observer. Je recueillis une première observation sur une modification spéciale de la couleur du sang. J’interprétai cette observation, et je fis une hypothèse que l’expérience prouva être fausse. Mais cette expérience me fournit une deuxième