Mon pere cependant de vos vertus charmé,
Preſt à trahir l’eſpoir dont il eſt animé,
Sans luy promettre rien le laiſſe encor pretendre,
Et veut dés aujourd’huy, vous recevoir pour gendre.
En vous cachant à tous comme à Tiberinus,
En l’occupant ailleurs…
Je ne veux point ſçavoir ſi je pourrois encore
Ravir à mon Rival un objet que j’adore ;
En vain vous m’en offrez les moyens dangereux ;
Je veux voir l’Eſperance interdite à mes vœux,
Et quoyque par ce coup ma mort ſoit infaillible,
Je veux voir deſormais mon bon-heur impoſſible.
Peut-eſtre qu’à la fin vos funeſtes apas
Engageroient mon cœur dans de honteux combats.
Je vous ſuis pour jamais.
Allez-vous à la fois me perdre avec mon pere ?
Malgré tous vos ſermens, & malgré vôtre amour,
Chargé de mon ſecret, l’allez-vous mettre au jour ?
Qui l’eut crû qu’Aquilie à ce point fût à plaindre ?
Et même que Titus euſt pû la faire craindre ?
Que vous répondre, helas ! dans le trouble où je ſuis ?
Sçais-je ce que je fais ? Madame, je vous fuis.
Arreſtez, ou donnez la mort à vôtre Amante.
Qui peut vous retenir ? & qui vous épouvante ?
Quoy vous deliberez ? & vous m’allez trahir ?
Ô Pere infortuné que tu me dois haïr !
Pourquoy t’ay-je aſſuré dans mon erreur fatale,
Que l’ardeur de Titus à ma tendreſſe égale