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SOUS LE SOLEIL DE SATAN

L’aveu fut reçu dans un profond silence. Les paroles extraordinaires parurent créer ce silence, s’y perdre d’elles-mêmes.

Alors l’abbé Menou-Segrais parla de nouveau :

— Avant de continuer, fit-il avec sa simplicité ordinaire, renoncez cette pensée à jamais, et priez Dieu de vous pardonner. De plus, je vous interdis de parler de ces choses à un autre que moi.

Puis, comme l’abbé ouvrait la bouche pour lui répondre, le magistral clinicien des âmes, toujours ferme dans sa prudence et son bon sens souverain :

— Gardez-vous d’insister, fit-il. Taisez-vous. Il ne s’agit plus que d’oublier. Je sais tout. L’entreprise a été irréprochablement conçue et réalisée de point en point. Le démon ne trompe pas autrement ceux qui vous ressemblent. S’il ne savait abuser des dons de Dieu, il ne serait rien de plus qu’un cri de haine dans l’abîme, auquel aucun écho ne répondrait…

Bien que sa voix ne décelât aucune excessive émotion, cette dernière se marqua pourtant à ce signe que l’abbé Menou-Segrais prit sa canne au pied du fauteuil, se leva, et fit