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SOUS LE SOLEIL DE SATAN



La route s’ouvrait de nouveau devant l’abbé Donissan. Il la reconnut. Il allait vite, très vite. D’abord, il remerciait Dieu, sans une parole, de ce qui lui avait été permis de voir. Il marchait comme environné encore de cette lumière qu’il avait connue. Ce n’était pas la présence, et c’était quelque chose de plus que le souvenir. Ainsi l’on s’écarte d’un chant qui longtemps vous suit.

Hélas ! c’était bien l’écho allant s’affaiblissant d’une mystérieuse harmonie, qu’il n’ouïrait plus jamais, jamais ! Le prolongement de sa joie dura peu. Chaque pas semblait d’ailleurs l’en éloigner, mais, quand par un geste naïf il s’arrêta, la fuite parut s’en accélérer encore. Il courba le dos, et s’en fut.

Peu à peu le paysage encore indécis à la toute première heure de l’aube lui devenait plus familier. Il le retrouvait avec tristesse. Chaque objet